Page:LeMay - La Chaine d'or, 1879.djvu/18

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La porte s’ouvre alors, puis une femme blême
M’apparaît aussitôt dans un méchant fauteuil.
Je m’arrête, surpris, un instant sur le seuil,
Car c’est elle qui chante. Elle se tait de suite
Et veut, dans sa frayeur, je crois, prendre la fuite,
Mais sur son siège dur elle retombe. Non,
Je ne saurais conter quel étrange rayon
Jaillit en ce moment de sa morne paupière,
Et comme elle reprit une attitude fière !
Malgré son front livide, elle était belle encor
Avec sa robe blanche, avec sa chaîne d’or
Dont les brillants anneaux flottaient sur sa poitrine.
Elle étendit vers moi sa main osseuse et fine :

— Venez-vous en ce lieu chercher de la pitié ?
Me dit-elle soudain. Au nom de l’amitié
Venez-vous demander qu’on songe à la détresse,
Qu’on ranime les cœurs qui sont dans la tristesse ?
····································································
Se couche-t-on chez vous quelquefois sans souper,
Et voit-on au chevet les spectres se grouper ?
····································································
Je vous ferai l’aumône. Aimez la Providence,
Et du bien qu’on vous donne usez avec prudence,
Car après le soleil on voit monter la nuit,