Page:LeMay - Picounoc le maudit, Tome II, 1878.djvu/58

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ment Victor en se levant pour donner une chaise à l’étranger, vous allez me parler de mon père, monsieur… de mon père que je ne connais point !…

— Oh ! dites-lui donc que nous l’attendons, reprit Noémie en s’essuyant les yeux, dites-lui qu’il revienne, ou qu’il nous demande d’aller à lui !

— Vingt ans n’ont donc pas suffi pour le faire oublier ? demanda l’étranger.

— Ah ! reprit la femme toute brisée par la douleur, on peut croire que je l’avais oublié, puisque je consentais à devenir la femme d’un autre, mais à mon âge, on ne fait plus de mariage d’amour, et, celui qui allait devenir mon deuxième époux savait bien qu’il ne m’avait pas toute entière…

— La reconnaissance, monsieur, ajouta Victor, est une vertu qui tient souvent la place de l’amour, et bien des hommes achètent le bonheur en la faisant naître dans les âmes qui ne veulent pas ou ne peuvent pas aimer.

— Cet homme que vous appelez Picounoc vous a fait beaucoup de bien, madame ?…

— Beaucoup, monsieur…