Page:LeMay - Reflets d'antan, 1916.djvu/82

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Avant qu’elle eut atteint d’un pied pourtant léger,
Le vieux wigwam qui seul pouvait la protéger,
La douce enfant sentit, pareils à des tenailles,
Les doigts durs et crispés de l’Esprit des batailles,
Mordre sa brune épaule. Elle entendit sa voix
Dont les cruels accents faisaient trembler les bois.

« Moi, je suis, disait-il, l’Esprit de la Vengeance.
J’ignore la pitié, j’abhorre la clémence.
À moi Nina ! Viens donc ! La belle vierge, à moi !
Mon antre étouffera sous sa large paroi,
Les cris du désespoir ! À moi les chastes charmes !
À d’autres maintenant la souffrance et les larmes...
Nina criait en vain :
                          ― « Jamais tu ne m’auras. »
Areskouï la prend dans ses robustes bras,
Et s’envole, semblable au hibou des ténèbres,
Avec sa douce proie, en ses antres funèbres.

« Or, l’Esprit de la Baie, ― en effet, c’était lui
Qui jouait sur les eaux quand le jour avait lui,
Ou que le soir brillait au rayon de la lune, ―
Or, l’Esprit de la Baie, inquiet, à la brune,
Chaque soir revenait en d’anxieux transports,
Jouer avec la vague ou rêver sur les bords.