Page:LeMay - Reflets d'antan, 1916.djvu/90

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Que vois-je ? Nos drapeaux, les lis, nos blanches fleurs,
Sont tombés sous les pieds des orgueilleux vainqueurs !
L’étendard rouge flotte, aile des mauvais anges,
Sur les murs où tantôt triomphaient nos phalanges !
L’air plaintif, abattu, des larmes dans les yeux,
Le prêtre, en ce moment, reste silencieux,
Mais il reprend bientôt, d’une voix plus contrainte :

― Du sein de cette terre il s’élève une plainte.
Au droit ancien, hélas ! succède un droit nouveau.
Le faible est opprimé, le fort devient bourreau.
Et, près du saint autel, un autel sans mystère
Offre au ciel indigné son encens téméraire.

Et la plainte grandit, et le joug est plus lourd.
Un malaise ineffable, un mugissement sourd,
Annoncent la tempête et des jours de détresse.
Il faut une victime, et l’échafaud se dresse...
Dans le sang du martyr, ô prodige inouï,
La liberté renaît... Tout s’est évanoui...
Sur le peuple loyal, sur la sanglante rive
Il descend du ciel calme une clarté plus vive.
L’homme de Dieu se tut. Son oeil humide et doux
Lentement retomba sur la foule à genoux.