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ment construit sur l’emploi de la pantomime rythmée. Après le départ des convives, Décius expose à Murena son dessein de pénétrer dans le couvent des Vestales pour parvenir jusqu’à celle qu’il aime. Il décide non sans peine Murena à l’accompagner dans sa folle entreprise. Les critiques milanais blâmèrent fort Viganô d’avoir donné ce spectacle immoral d’un ami entraînant au mal son ami.
Le troisième acte se passe à l’intérieur du temple de Vesta. C’est la nuit. Emilia garde le feu sacré. « Comment donner une idée, s’écrie Carlo Ritorni, du jeu de la Pallerini, dont le physique et les traits répondaient si exactement aux intentions du Maître voulant peindre une terreur tragique par des images toutes grecques et romaines. Elle se tient appuyée à l’autel, absorbée dans sa rêverie. Elle remue et entretient le foyer. Elle s’en écarte un peu et, réfléchissant à ce qui se passe en elle, semble écouter la voix de sa passion naissante. Elle veut d’abord en triompher en faisant appel à la raison. Elle pense à son caractère sacré, à son devoir, à la religion. A la fin elle croit plus efficace de recourir à la déesse et la supplie de la délivrer de cet amour coupable... Tandis qu’elle descend les marches de l’autel sur lesquelles elle a prié, une vision lui représente les traits de Décius. Elle veut chasser cette image, mais inutilement. Elle baisse les regards vers le sol et s’absorbe dans une prière. Quand elle les relève, la vision est toujours là. Elle ne peut résister et lui tend les bras, mais aussitôt elle recule épouvantée. Elle fuit vers l’autel, en proie au remords. Elle prie, mais en vain, on sent qu’elle souhaite de tout son être le retour de l’image enfin évanouie. A ce moment paraît Décius, accompagné de Murena. »
Il serait fastidieux de suivre Ritorni dans sa minutieuse description du jeu des deux acteurs en cette scène de séduction qui mettait Stendhal dans un état difficile à décrire (1). Après une longue résistance, la Vestale succombe et Décius l’emporte dans ses bras. A cet instant, le feu sacré s’éteint et la scène se trouve plongée dans l’obscurité. Emilia échappe à son amant et vient s’abattre évanouie au pied de l’autel. Décius en fuyant
(1) Voir la lettre du 3 septembre 1818 à De Mareste.