La musique lui change son âme.
Vous êtes, en ce moment qui va mourir, maîtresses toutes-puissantes, ô Muses !
Suspens délicieux des souffles et des cœurs !… La pesanteur tombe à ses pieds ; et ce grand voile qui s’abat sans aucun bruit le fait comprendre. On ne doit voir son corps qu’en mouvement.
Ses yeux sont revenus à la lumière…
Jouissons de l’instant très délicat où elle change de volonté !… Comme l’oiseau arrivé au bord même du toit, brise avec le beau marbre, et tombe dans son vol…
Je n’aime rien tant que ce qui va se produire ; et jusque dans l’amour, je ne trouve rien qui l’emporte en volupté sur les tout premiers sentiments. De toutes les heures du jour, l’aube est ma préférée. C’est pourquoi je veux voir avec une tendre émotion, poindre sur cette vivante, le mouvement sacré. Voyez !… Il naît de ce glissant regard qui entraîne invinciblement la tête aux douces narines vers l’épaule bien éclairée… Et la belle fibre tout entière de son corps net et musculeux, de la nuque jusqu’au talon, se prononce et se tord progressivement ; et le tout frémit… Elle dessine avec lenteur l’enfantement d’un bond… Elle nous défend de respirer jusqu’à l’instant qu’elle jaillisse, répondant par un acte brusque à l’éclat attendu et inattendu des déchirantes cymbales !…
Oh ! la voici donc enfin, qui entre dans l’exception et qui pénètre dans ce qui n’est pas possible !… Comme nos âmes sont pareilles, ô mes amis, devant ce prestige, qui est égal et entier pour chacune d’elles !… Comme elles boivent ensemble ce qui est beau !