Page:Le Bon - Lois psychologiques de l’évolution des peuples.djvu/16

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

changements politiques, et nous tâcherons de démontrer que de cette constitution mentale découle leur histoire. Nous étudierons le degré de fixité et de variabilité des caractères des races. Nous essaierons de découvrir si les individus et les peuples marchent vers l’égalité ou tendent au contraire à se différencier de- plus en plus. Nous verrons ensuite que les éléments dont se compose une civilisation arts, institutions, croyances sont les manifestations directes de l’âme des races, et ne peuvent, pour cette raison, passer d’un peuple à un autre. Nous terminerons enfin en tâchant de déterminer sous l’influence de quelles nécessités les civilisations pâlissent, puis s’éteignent. J’ai longuement traité ces problèmes dans mes ouvrages sur les civilisations de l’Orient. Ce petit volume n’en sera qu’une brève synthèse.

L’impression la plus claire rapportée de mes lointains voyages dans les pays les plus divers, est que chaque peuple possède une constitution mentale aussi fixe que ses caractères anatomiques, et d’où ses sentiments, ses pensées, ses institutions, ses croyances et ses arts dérivent. Tocqueville et d’autres penseurs illustres ont cru trouver dans les institutions des peuples la cause de leur évolution. Je suis persuadé au contraire, et j’espère prouver, que les institutions ont sur l’évolution des civilisations une importance très faible. Elles sont le plus souvent des effets, et bien rarement des causes.

Sans doute l’histoire des peuples se trouve déterminée par des facteurs fort divers. Elle est pleine de cas particuliers d’accidents qui ont été et qui auraient pu ne pas être. Mais à côté de ces hasards, de ces circonstances accidentelles, il y a de grandes lois permanentes dirigeant la marche de chaque civilisation. De ces lois permanentes, les plus générales, les plus irréductibles découlent de la constitution mentale des races. La vie d’un peuple, ses institutions, ses croyances et ses arts ne sont que la trame visible de son âme invisible. Pour qu’un peuple transforme ses institutions, ses croyances et ses arts, il doit d’abord transformer son âme pour pouvoir léguer à un autre sa civilisation, il faudrait qu’il lui léguât aussi son âme. Ce n’est pas là sans doute ce qu’enseigne l’histoire mais nous montrerons aisément qu’en enregistrant des assertions contraires elle s’est laissée tromper par de vaines apparences.