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grève. Elle en comporte bien d’autres.

Son explosion soudaine fut la conséquence de la formation d’énergies sociales nouvelles, inaperçues, mais grandies dans l’ombre depuis longtemps. Conscientes de leur force, elles se sont dressées devant l’Étatisme parlementaire et, par un foudroyant succès, ont montré ce que pourrait devenir leur rôle.

Ce pouvoir imprévu s’élève aussi bien contre la puissance de l’État que contre celle du socialisme, simple floraison de l’Étatisme. Les collectivistes eurent donc, en vérité, bien tort de se réjouir de la réussite d’une grève dont évidemment, ils ne soupçonnèrent aucunement la portée.

Le triomphe des postiers fut favorisé par l’impopularité croissante d’un Parlement qui n’a su qu’édifier des lois incohérentes et persécuter, avec la plus cruelle intolérance, des classes entières de citoyens.

L’histoire, rapportée à la Chambre, de cette receveuse des postes dont un préfet exigeait la révocation, uniquement parce qu’elle allait à la messe, provoqua dans le public, une véritable explosion d’indignation et fut, pour beaucoup, dans la sympathie témoignée aux grévistes.

Cette nouvelle évolution des aspirations populaires nous ramène à une période d’anarchie et de régression. La Révolution avait remplacé les corporations par la liberté, et voici que les corporations se rétablissent. Elle avait supprimé l’impôt personnel, pour éviter l’inquisition fiscale et nous allons rétablir cette inquisition qui deviendra plus oppressive que les anciennes persécutions religieuses. Les vieilles tyrannies renaissent donc tour à tour et changent simplement de noms. La seule liberté de l’avenir sera celle de nous haïr. La théocratie syndicaliste n’en tolère pas d’autres.

La soudaineté de la grève dont nous venons de parler et son absence de motifs prouve clairement qu’elle était issue d’un nouvel état mental des foules. Dès qu’ils l’eurent proclamée, les postiers eurent bien de la peine à lui trouver des causes avouables. Leurs affiches trahirent nettement cet embarras.

Dans une proclamation du Conseil central de la grève publiée par le Matin du 19 mars 1909, nous lisons :

Jamais nous n’avons envisagé la grève comme moyen de défense professionnelle, ce sont les injures adressées