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place m’impose. Il ne s’agira point ici, de contester les intentions du législateur, sans doute excellentes, mais de montrer les résultats de ses actes.

Lois sur tes primes à la marine marchande.

Coût annuel actuellement, 41 millions. Résultat : accélération rapide de la décadence de notre marine et rentes importantes servies à des compagnies allemandes.

L’énormité de cette double conséquence est telle qu’il faut entrer dans certains détails. Je les emprunte au livre récent de Jules Huret sur l’Allemagne. La compétence de son interlocuteur, monsieur Platé, n’est pas discutable, puisqu’il est directeur du Norddeutscher Lloyd, une des deux ou trois plus grandes compagnies de navigation du monde.

Je dis à monsieur Platé : « Vous qui assistez et participez à la prospérité extraordinaire des ports allemands, comment expliquez-vous notre arrêt et vos progrès ?

— C’est bien simple, me répondit-il assez brutalement, votre système de primes à la navigation, c’est la mort. Vous donnez de l’argent pour ne rien faire : on ne fait rien ! Mais le résultat le plus cocasse de ce système, c’est que l’argent que vous distribuez ainsi a profité jusqu’à présent à des Allemands et à des Anglais.

« Je ne devrais pas dire cela, ajouta-t-il, puisque ce sont mes compatriotes qui bénéficient de vos erreurs. Mais, puisque vous me demandez mon avis, je vous le donne en toute honnêteté. »

Monsieur Platé explique ensuite comment des groupes étrangers fondèrent en France des sociétés de bateaux avec des capitaux allemands et anglais. L’État français payait, comme on le sait, des primes pour les kilomètres parcourus même par les bateaux vides. « On fit donc des tours du monde bien rémunérateurs aux frais du budget français. »

Un armateur me disait qu’en huit ans, en promenant ainsi son bateau vide, il avait regagné le prix de sa construction.

Monsieur Platé cite des bateaux refusant des chargements pour ne pas perdre de temps, trouvant plus de bénéfice à circuler vides. Monsieur Huret ayant fait observer que la loi avait été modifiée et qu’il fallait maintenant que les bateaux fussent chargés pour toucher la prime, le directeur du Lloyd lui fit observer que presque rien