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Page:Le Braz - Au pays des pardons, 1894.djvu/163

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AU PAYS DES PARDONS

magiques horizons, visibles pour lui seul, vers lesquels l’attirait un aimant si fort qu’il en avait des fourmillements dans les jambes. C’est là, dans la paix des landes mélancoliques, que pour la première fois l’Esprit de la poésie primitive le vint visiter[1]. Il n’avait, en effet, que douze ans lorsqu’il composa sa pièce de début, celle-là même qui, refondue et remaniée, s’est appelée plus tard la « Confession de Jean Gamin » (Covizion Yann Grennard). Il y disait


Je suis un garçonnet, hardi et insouciant
Rien ne m’agrée tant que de jouer à la toupie ;
Faire l’école du renard[2] me plaît aussi
Dénicher des nids, lutter et me battre.

Déchirée est ma veste, en lambeaux mon gilet ;
Mes braies ne tiennent plus, Mon chapeau n’a plus de rebords,
À force d’échanger des horions avec les camarades ;
Et, quand je rentre à la maison, là encore les coups de bâton m’attendent.

  1. Le recteur de Pleumeur, M. Barra, lui avait donné les premières leçons de métrique bretonne. « Sois barde ! » disait à Yann cet homme vénérable ; « après celle de prêtre, je ne sais pas de plus belle vocation. »
  2. L’école buissonnière.