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Page:Le Braz - Au pays des pardons, 1894.djvu/176

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RUMENGOL, LE PARDON DES CHANTEURS

nomie. Il se contentait de vivre au jour le jour, dépensait sans compter, en vrai seigneur de lettres, et, dans les semaines d’opulence, se payait le luxe d’une cour de gueux qui se gobergeaient à ses frais en exaltant sa générosité.

Pas une fois il ne lui vint à l’esprit d’envoyer à sa femme quelque peu de l’argent qu’il gagnait. Il semblait ne se souvenir plus qu’elle existât. Elle, de son côté, avait trop d’amour-propre pour s’abaisser à recourir à lui. Il lui avait laissé, en l’abandonnant, quatre « créatures » sur les bras, quatre gaillards de fils nés dans les quatre ans qui précédèrent la mort de la petite Marie. Pour les élever, elle se mit en service. Pendant qu’elle peinait chez les autres, une voisine obligeante surveillait sa maison et gardait sa marmaille.

« — Un soir que je rentrais de l’ouvrage, j’aperçus un homme qui se haussait pour regarder par la lucarne à l’intérieur de la chaumière. Je reconnus Yann. Son coup d’œil jeté, il s’en alla. Il était sans doute venu voir si la petite Marie n’était pas encore ressuscitée. À de longs intervalles il fit ainsi quelques retours dans nos para-