Page:Le Braz - Au pays des pardons, 1894.djvu/283

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
262
AU PAYS DES PARDONS

une sorte de profanation de la fête. Que ne laissait-on les gens s’arranger entre soi ? Et quel besoin d’associer ces intrus, ces gallots, à la glorification de Ronan ?

Les Bretons entourent leurs saints d’un culte jaloux. Un vent de révolte traversa les cerveaux surexcités ; on cria haro sur les « Enfants de Mary Robin[1]. » Lors de la Troménie qui fut célébrée le 14 juillet 1737 éclata une véritable émeute dont un procès-verbal publié dans l’inventaire des archives départementales nous a conservé le souvenir. Les gendarmes furent pourchassés à coups de pierres et ne durent leur salut « qu’à la vitesse de leurs chevaux. »

« — Dao !… Dao ! » hurlaient les pèlerins. Ce que le sire Dugas traduit en son style de brigadier « Donnons dessus !… Saccageons-les !… »

Les choses se passent aujourd’hui d’une façon plus civile. L’honneur de porter les bannières est toujours un objet de brigue, seulement il se paie, s’octroie à l’enchère au plus offrant. C’est moins

  1. Bugale Mari Robin, sobriquet sous lequel on désigne encore les gendarmes en ce pays.