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Page:Le Braz - Au pays des pardons, 1894.djvu/51

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AU PAYS DES PARDONS

être de chanter. Elle a bien assez à faire, prétend-il, de décrasser les bourgeois. Ces bourgeois, il les exècre ; il a pour eux le mépris chevelu des rapins de 1830, interprété dans une langue dont je me refuse à traduire les violences pittoresques.

« — Parlons un peu de vos saints, Mabik Rémond. Commentez-moi votre musée. »

« — Voilà. C’est sur ces murailles que je m’essaie. Quand j’ai campé mon bonhomme et que je l’ai désormais en main, je passe par-dessus une couche de lait de chaux, — et j’entreprends autre chose. Vous voyez ce saint Trémeur ? Je l’ai refait quinze fois. C’est très difficile à attraper, un personnage de cette sorte, qui a sa tête dans les bras au lieu de la porter sur ses épaules. Ce saint Laurent aussi m’a coûté beaucoup de peine, et plus encore ce saint Herbot… Mes modèles ? Parbleu, les statues de bois ou de pierre devant qui je m’agenouille dans les chapelles, durant mes campagnes de ramonage à travers le pays trégorrois, depuis Plestin jusqu’à Paimpol. Je les contemple, je les prie, et j’emporte leur image dans mes yeux… »