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Page:Le Braz - La légende de la mort chez les Bretons vol 1 1902.djvu/232

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douleur de ses camarades. Il n'était pas de méchant tour qu'on ne lui jouât.

Il avait d'ailleurs une âme sans rancune et se prêtait bonassement à tout ce qu'on exigeait de lui.

En ce temps-là—je ne sais si cela existe encore — les grands élèves avaient au collège des chambres qu'ils occupaient à deux ou trois. On les appelait pour cette raison des chambristes1.

Notre « innocent » avait pour compagnons de chambrée Jean Coz, de Pédernek, et Charles Glaouier, de Prat.

Un soir qu'Anton L'Hégaret — ainsi se nommait le briz-zod — était resté prier à la chapelle, Charles Glaouier dit à Jean Coz :

— Si tu veux, nous allons bien nous amuser, aux dépens de l'idiot.

— Comment cela?

— Tu vas défaire tes draps. Puis, nous les suspen

i. M. Renan, qui fut élève en ce petit séminaire de Tréguier et qui lui a conservé un pieux souvenir, trace le portrait suivant des jeunes gens qui le peuplaient, vers 1830 (Souvenirs d'enfance et de jeunesse, p. 13o) :

« Mes condisciples étaient pour la plupart de jeunes paysans des environs de Tréguier, vigoureux, bien portants, braves, et, comme tous les individus placés à un degré de civilisation inférieure, portés à une sorte d.affectation virile, à une estime exagérée de la force corporelle, à un certain mépris des femmes et de ce qui leur parait féminin. Presque tous travaillaient pour être prêtres... Le latin produisait sur ces natures fortes des effets étranges. C'étaient comme des mastodontes faisant leurs humanités . »