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Page:Le Braz - La légende de la mort chez les Bretons vol 2 1902.djvu/180

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son échine sous les coups et demeura inébranlable. On voyait ses flancs haleter comme un soufflet de forge et deux fumées blanchâtres s'échapper de ses naseaux dans la nuit glacée, car il était nuit pleine à cette heure et les étoiles brillaient toutes bleues au firmament.

— Voici du nouveau, songea Marie-Job Ker-guénou.

Mogis, depuis dix-sept ans bientôt qu'ils faisaient ménage ensemble, comme elle disait, s'était constamment montré un animal exemplaire, ne voulant que ce que voulait sa maîtresse. Qu'est-ce donc qui le prenait ainsi, ce soir, à Timprovisto, quand il avait autant de raisons de se hâter vers le chaud de sa crèche qu'elle, Marie-Job, vers le chaud de son lit ? Elle se décida, non sans maugréer, à descendre de son banc, pour le savoir. Elle s'attendait à trouver quelque obstacle, peut-être quelque ivrogne couché en travers de la chaussée. Mais elle eut beau regarder, fouiller l'ombre en avant d'elle (ils étaient à l'endroit où le chemin dévale vers Trovern, pour s'engager ensuite dans la grève), elle n'aperçut rien d'extraordinaire. La route fuyait déserte entre les talus qui, seuls, projetaient sur elle, çà et là, l'ombre de leurs chênes ébranchés.

— Allons, Mogis 1 dit la vieille, en manière d'encouragement.

Et elle saisit le cheval parla bride. Le cheval renifla bruyamment, secoua la tête, et s'arc-bouta sur ses pieds de devant, refusant de faire un pas.

AlorSj Marie*Job comprit qu'il devait y avoir