Page:Le Braz - La légende de la mort en Basse Bretagne 1893.djvu/156

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grands trous noirs. Il n’avait pas de nez. Sa bouche riait d’un rire qui allait rejoindre ses oreilles.

Moi, je sentais des gouttes de sueur froide sourdre de mes tempes et ruisseler tout le long de ma poitrine, de mes cuisses et de mes jambes, jusqu’à mes pieds.

Quant à mes cheveux, ils étaient si raides que j’aurais pu, je crois, le lendemain encore, m’en servir comme d’aiguilles.

Ah ! il n’y a pas beaucoup de gens à savoir comme moi ce que c’est que la peur !

Attendez !… ce n’est pas tout.

L’homme à la tête démontée avait frôlé mon lit, en passant, mais il s’en était éloigné aussitôt pour aller se poster près de la fenêtre. Or, à ce moment, un deuxième personnage entra de la cuisine dans la chambre. Je l’entendis venir avant de le voir. Car il faisait un fameux bruit ! On l’eût dit chaussé de sabots trop grands et trop lourds pour ses pieds. Il les traînait sur le plancher, les heurtait sans cesse l’un contre l’autre, trébuchait, se rattrapait, menait, en un mot, un tel vacarme que, ma foi ! persuadé que c’était à moi qu’on en voulait décidément, et, préférant la mort même à l’angoisse qui me dévorait, je rejetai mes draps et me dressai sur mon séant.

L’homme aux sabots s’arrêta immédiatement ; il était à trois pas de mon chevet.

Je le reconnus tout de suite. C’était Marco Hamon, le pauvre cher Marco.

Il me lança un regard désespéré qui me fit dans le cœur comme le froid d’un coup de couteau. Puis, ayant