XXV
La veillée mortuaire s’appelle ann noz-veil.
Certaines personnes privilégiées savent d’avance quand il doit y en avoir une dans la région.
Mon beau-père était de ce nombre. Il avait un bâton d’épine rouge qu’il appelait « son compagnon de nuit ». C’était un solide penn-baz, qui s’assujettissait au poignet, comme tous les penn-baz, à l’aide d’un cordonnet de cuir. Lorsque mon beau-père rentrait de la promenade, il ne manquait jamais d’aller suspendre son bâton à un clou derrière l’armoire. Or, deux ou trois jours avant qu’il dût y avoir une veillée funèbre dans le quartier, le bâton d’épine rouge se mettait à osciller, lentement d’abord, puis de plus en plus vite, entre l’armoire et le mur, les heurtant à tour de rôle.
Quand il heurtait l’armoire, on entendait : doc.
Quand il heurtait le mur, on entendait : dic.
On eût dit le balancier d’une horloge, ou mieux le battant d’une cloche sonnant un glas.
Ce dic-a-doc ! dic-a-doc ! durait quelquefois une demi-heure.