Page:Le Braz - La légende de la mort en Basse Bretagne 1893.djvu/262

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Sur son bras, le tout petit enfant gémissait, à cause de la fraîcheur, bien qu’il s’efforçât de le bien abriter avec le pan de sa veste.

— Ah ! crièrent en chœur tous les ossements du charnier, tu as eu une fière idée de te faire accompagner de cet enfant ! sinon que nous n’avons pas le droit de le priver du baptême, tes os et les siens, Jozon du Guern, seraient déjà dispersés parmi les nôtres !

Le lendemain, le jeune homme assista, en qualité de parrain, le nouveau-né de Gaud Keraudrenn sur les fonts baptismaux de Servel. Mais, rentré chez lui, il ne fit que dépérir. La mort l’avait regardé de trop près. Il ne passa pas l’année[1].


(Conté par Pierre Simon. — Penvénan, 1889.)
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  1. Dans ses traits essentiels, l’histoire est vraie ; c’est une histoire d’ivrogne ; un garçon pris de boisson rapporta chez lui une tête de mort qu’il avait enlevée d’un charnier ; dégrisé, il fut saisi de terreur, et demanda conseil au recteur qui lui indiqua pour se tirer d’affaire le moyen que rapporte la légende. La chose s’est passée vers 1860. Mais il convient d’ajouter que c’est là un thème légendaire fort répandu en Bretagne, M. Le Braz a recueilli des récits analogues à Elliant, d’autres à Plougastel. Les événements réels ne servent jamais que d’occasion à l’apparition de légendes déjà toutes prêtes à éclore. Cf. in P. Sébillot, Traditions et superstitions de la Haute-Bretagne, t. I, p. 255 et seq. : La coiffe enlevée. Cf. aussi in Mme  de Cerny, Saint-Suliac et ses traditions (Dinan, 1861) : Les trois mortes ; La jeune fille du cimetière. — [L. M.].