Page:Le Braz - La légende de la mort en Basse Bretagne 1893.djvu/476

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    « Je suis le charpentier qui a sculpté — le premier ses calvaires. — Vous voyez cette baguette blanche que je tiens : — Je vais vous la donner maintenant. — Votre mari et vos enfants, — avant peu vous les reverrez. »


    VI

    Dès lors, elle marcha d’une telle allure — qu’elle arriva dans son pays promptement. — À la maison des siens elle se rendit ; — la baguette blanche la conduisit.

    Chez son mari quand elle fut, — à être logée elle demanda — avec déférence et humilité. — Nul chrétien ne la reconnaissait.

    La maîtresse de maison était altière — et lui répondit sèchement : — « Ici, vous ne serez pas logée ; — allez où bon vous semblera ! »

    Son mari n’était pas à la maison. — Ses enfants, entendant — leur pauvre mère demander logement — à leur marâtre, si humblement, eurent pitié d’elle, et elle fut logée, — grâce à ses enfants, croyez-le bien ; — oui, en dépit de la marâtre, — elle fut dignement hébergée par eux.

    La pauvre femme, parvenue au seuil — de sa maison (de la maison) où demeurait son mari, — s’assit sur le rebord d’une auge de pierre, — et demanda la permission d’y coucher.

    Sa fille, qui allait et venait, — à son frère prêtre disait : — « Cette femme a quelque chose d’étrange ; — à la voir, j’ai le cœur serré.

    « La mère qui nous a enfantés, — vous et moi, mon frère prêtre, — lui ressemblait fort, je trouve. — Je me sens une tendresse chaude pour elle. »

    La femme était là, sur le pas de la porte. — Son fils l’aborda, plein de déférence. — Avec respect et humilité, — il la prit par la main.

    Au foyer elle fut amenée — par sa fille et par son fils prêtre. — Là, son fils la fit asseoir — à la place qui lui était réservée, à lui-même.