Aller au contenu

Page:Le Braz - La légende de la mort en Basse Bretagne 1893.djvu/92

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

l’heure emplissait l’église, il ne restait plus personne. Elle faillit s’évanouir de stupeur. Mais avec de bonnes paroles le recteur la réconforta.

— Marie, lui dit-il, racontez-moi ce qui s’est passé. Elle raconta tout, point par point, sans omettre un détail. Le récit terminé, le recteur prononça tristement :

— Venez, Marie. Celui qui vous a dépouillée de votre bague de noces n’a pas dû l’emporter bien loin.

Ce disant, il franchissait la balustrade du chœur et gravissait les marches de l’autel. Il souleva la nappe. L’alliance était sur la pierre sacrée.

— Emportez-là, dit-il, en la rendant à la jeune femme, et rentrez chez vous. Vous avez beaucoup aimé, vous aurez beaucoup à pleurer.

…Quinze jours après, Marie Cornic apprenait qu’elle était veuve. Le navire que commandait son mari avait sombré, en vue des côtes d’Angleterre, la nuit où elle assistait à la messe étrange, et à l’heure même où le « chasse-gueux des morts » la contraignait à quitter sa bague.


(Conté par Jeanne-Marie Bénard, femme d’un douanier et originaire de Bréhat. — Port-Blanc en Penvénan, [Côtes-du-Nord].)


______