Page:Le Braz - Le gardien du feu, 1909.djvu/88

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la bouche comme un bâillon. Alors, elle, croyant ou feignant de croire que, si je levais ainsi le bras, c’était pour la frapper, elle pencha la tête et dit avec un calme dédaigneux :

— À ton aise !… Donne-moi le coup de grâce et que tout soit fini !

Oh ! à la seule idée qu’elle pût me supposer capable d’une telle infamie, je fus sur le point de la broyer, de la piétiner, en effet. Durant l’espace d’une seconde, je me vis, sans horreur aucune, l’emportant, roidie, jusqu’à l’extrémité de la Pointe et, après un dernier baiser sur ses lèvres mortes, sautant avec son cadavre dans l’abîme. Il y avait peut-être là quelque avertissement du destin. Quel dommage, pour elle comme pour moi, que je n’y aie point obéi !… Au lieu de cela, fou de désespoir et de honte, je gagnai d’un bond le seuil de la chambre et je me précipitai, tête baissée, dans la nuit.

Tout le ciel était tendu comme d’une funèbre draperie de nuages que le vent remuait