Aller au contenu

Page:Le Braz - Vieilles histoires du pays breton, 1905.djvu/194

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
190
AUX VEILLÉES DE NOËL

maisons surgirent ; et plus haut que les maisons montèrent des palais, et plus haut que les palais so dressèrent des clochers d’églises. À la place de la mer disparue, une mer nouvelle s’épandait, un océan de toits, une houle d’ardoises bleuissantes, où les cathédrales avaient une majestueuse immobilité de vaisseaux à l’ancre, où les flèches de pierre pointaient comme des mâts.

Une ville, non ! Mais un peuple de villes. Elles étaient toutes là, pressées les unes contre les autres, les cités dont la tradition bretonne a perpétué jusqu’en notre temps les noms et le souvenir : Tolente qui fut, dit-on, où est Plouguerneau ; Occismor qui fut où est Saint-Pol ; Loxobie qui fut où est le Coz-Ieodet ; Ker-ls, enfin, Ker-Is la somptueuse, dont le spectre domine encore tout le pays de Cornouailles,

La Bretagne des jours fabuleux ressuscitait, sous la forme d’une Jérusalem messianique, à l’appel du Messie. L’âge d’or des vieilles tribus armoricaines revivait.

Jésus fit un signe.

Et voilà les cloches de Noël de s’abattre de-ci de-là sur les clochers de ces villes de rêve ; les voilà de se nicher dans les hautes chambres, avec leurs longues chevelures blondes ou brunes pendant jusqu’à terre, pareilles à des cordes tressées. Et les étoiles errantes de se disperser dans les maisons, d’allumer une flamme dans les âtres, de brûler derrière les vitres, sur les tables, comme les chandelles joyeuses d’un réveillon. Dans les rues sinueuses, baignées d’une lumière élyséenne qui les faisait ressembler à des sillages de barques, tant elle les argentait doucement, des ombres commencèrent à se mouvoir. Silhouettes encore indistinctes, mais qui allaient se précisant.

Ainsi que le lui avait narquoisement recommandé sa