Page:Le Braz - Vieilles histoires du pays breton, 1905.djvu/20

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prélevés sur les seigneurs de passage dans les alentours de la Lieu-de-Grève. Car ils n'aimaient à pêcher que le gros poisson. Ils étaient très doux avec le petit peuple. ... - Voyez donc ! dit Kaour à ses frères, comme ils arrivaient au pied du Roc'h-Kerlèz. Il leur montrait du doigt une forme humaine debout là-haut, près de la croix qui dominait le rocher. - Damné sois-je ! s'écria Guennolé, c'est la Charlézenn ! Ils la hélèrent. Mais elle ne parut point les entendre. Alors, ils se hissèrent jusqu'à elle en se cramponnant aux saillies de la pierre, à des touffes d'ajonc. - Tu attends quelqu'un, Gaïdik (2) ? - Oui, j'attends la mer. - Pourquoi faire ? - Pour m'y jeter. - Tu veux donc mourrir ? - Oui... Je me serais déjà précipitée... Mais sur les roches nues je me serais fait trop mal... J'attends qu'il y ait de l'eau en bas. Cela ne tardera plus.

En effet, la mer montait. Sur l'immense plaine de sable elle roulait avec le fracas, avec le farouche hennissement d'une horde d'étalons lancés au galop. L'aîné des Rannou dit : - Conte-nous ce qui t'est arrivé, Gaïdik. Si c'est quelqu'un qui a cherché à te nuire, livre-nous son nom seulement ; nous sommes trois et nous te vengerons. - Je ne conterai ni à vous ni à personne ce qui m'est arrivé. J'en ai assez de la vie, voilà tout. -