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Page:Le Braz - Vieilles histoires du pays breton, 1905.djvu/222

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AUX VEILLÉES DE NOËL

mérites du Christ et la vertu de saint Kadô [1])… Tu n’auras qu’à te pencher pour en boire à pleines gorgées. Et c’est un vin, mon cher, comme on n’en goûte qu’au paradis. Tu m’en diras des nouvelles !

Le fermier se grattait le bout du nez.

— J’ai idée que tu te moques de moi, Dall an Dribunér.

— Crois ou ne crois point. Cela te regarde. Il était de mon devoir de te témoigner ma reconnaissance à ma manière… Au revoir, fils ! grâce à toi me voilà presque rendu à destination. Il ne me reste qu’à te souhaiter bon voyage !

Et le vieux, franchissant une barrière, s’engagea dans les champs, tandis que l’ivrogne, remonté tant bien que mal sur son siège, criait à Rouzic un « hue ! » formidable, et que la bonne jument s’enlevait en faisant feu des quatre pieds.


III

— Allez à la messe avec nos invités, disait Fanta Gouronnec à son mari. Je suffirai bien toute seule à surveiller la cuisson du repas et à disposer le couvert… Partez sans crainte ; la table sera prête à votre retour…

Le bourg était silencieux et comme désert. À peine si

  1. C’est une tradition répandue en Basse-Bretagne que la nuit de Noël, pendant le temps que dure la consécration, l’eau des sources se change en vin pur. J’ai mentionné plus haut l’aventure authentique du pauvre Nonnic Gartiantès, qui, lui, se noya tout à fait, pour avoir voulu s’assurer de la réalité du miracle (cf. Nédélek).