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Page:Le Braz - Vieilles histoires du pays breton, 1905.djvu/301

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LA HACHE


III

Et, après un silence troublé seulement par le bruit du vent au dehors et les craquements des volets, elle reprit ;

— La voisine me fit, sur mes supplications, ce récit que j’ai retenu point par point :

« Un jour, des bohémiens errants, montreurs d’ours et diseurs de bonne aventure, s’égarèrent dans la forêt de Porthualt ; ils arrivèrent, harassés, à bout d’haleine et de forces, dans la clairière où travaillait alors François Harnay. Celui-ci, homme généreux et hospitalier, les admit au repas de famille, les hébergea une nuit, dans son appentis, et, le lendemain, les mit dans leur chemin, sans vouloir accepter d’eux aucun argent. Un vieux, presque centenaire, qui paraissait être le chef de la bande, lui dit :

« — Ton accueil nous a touchés. Nous t’en aurons une gratitude éternelle, et ton nom sera vénéré jusque chez les enfants de nos petits-enfants. Je veux te faire un cadeau qui puisse t’être utile. Reçois-le en souvenir de nous. Je suis assuré d’avance qu’il te portera bonheur.

« Et il sortit de son havresac cette hachette.

« — Ceci te sera un talisman, ajouta le vieillard, à la condition que tu t’en serves toujours comme d’un outil de travail, jamais comme d’un arme de combat.

« Harnay prit la hache et remercia.

« Difficilement il en eût trouvé une meilleure. Elle eût coupé du fer. Avec cela, inusable, et jamais ébréchée. Durant douze années qu’il la mania, il n’eut point à l’afû-