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de la vie de Mahomet.

fondre à l’improviste sur les idolâtres, il défendit d’entretenir aucune communication avec eux. Hateb, pressé par le désir de sauver sa famille, transgressa la loi. Il écrivit ces mots : « Hateb, fils de Battea, aux Mecquois, salut. Apprenez que l’apôtre de Dieu se dispose à vous attaquer. Préparez-vous à la défense. » Sara, servante des fils de Hashem, se chargea pour dix écus d’or de porter la lettre. Mahomet découvrit la trahison[1]. Il envoya Ali et Zobaïr à la poursuite de Sara. Ils l’atteignirent à quelque distance de la Mecque. On lui demande la lettre. Elle proteste qu’elle n’en a point ; on la fouille ; les recherches sont vaines. Ali, indigné, lève son sabre, et dit qu’il va lui abattre la tête. Sara, effrayée, déploie ses longs cheveux, et rend l’écrit caché dans leur épaisseur. Mahomet montrant à Hateb le gage de sa perfidie, lui demanda quel motif avait pu le porter à violer sa défense. « Apôtre de Dieu, répondit le coupable, je prends le ciel à témoin que je n’ai point oublié l’obéissance que je vous ai jurée, et que mon cœur n’a point changé de religion[2]. Mais étranger à la Mecque, j’ai laissé au milieu des idolâtres une femme et des enfans. Ils y sont sans parens, sans amis. Je voulais qu’un service signalé leur fit trouver des protecteurs. » « Apôtre de Dieu, s’écria Omar, Hateb est un hypocrite et un incrédule ; permettez que je lui coupe la tête. » — « Arrêtez, Omar. Épargnez le sang de mes compagnons. Hateb est un de ceux qui ont combattu à la journée de Beder. Il est absous. » Mais, afin d’arrêter un exemple dont les suites eussent été dangereuses, il fit descendre ce verset du ciel : « Ô croyans ! n’entretenez aucune liaison avec mes ennemis et les vôtres. Vous leur montrez de la bienveillance, et ils ont

  1. Des écrivains enthousiastes disent que Gabriel, descendit du ciel pour l’en instruire.
  2. Abul-Feda, page 103.