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abrégé

Bannis de la société, en exil au milieu de leurs concitoyens, ils pensèrent dans leur détresse qu’ils n’avaient de refuge qu’en Dieu. Il les regarda avec bonté, parce qu’ils se convertirent, et qu’il est indulgent et miséricordieux[1]. »

À peine était-il de retour à Médine, qu’il eut la joie d’apprendre la soumission des Takifites. Cette tribu guerrière avait jusqu’alors résisté à ses armes ; mais, sans alliés, entourée d’ennemis, harassée sans cesse par les troupes de Malec, chef des Hawazenites, elle se vit contrainte de suivre le torrent. Elle envoya dix ambassadeurs à Médine[2]. Admis à l’audience du prophète, ils proposèrent d’embrasser l’islamisme, à condition qu’ils conserveraient encore trois ans leur idole el Lat (c’était la grande déesse des Arabes ; mais les Takifites lui rendaient un culte particulier) ; leur proposition fut rejetée. Ils demandèrent qu’il leur fût permis de la garder au moins un mois. Mahomet refusa d’y consentir. Ils le conjurèrent de les exempter de la prière. Il leur répondit qu’une religion sans prière n’avait rien de bon. Forcés de céder aux circonstances, ils se soumirent et se firent musulmans. Pour s’assurer de leur conversion, le prophète envoya avec eux Moghaïra et Abusofian, fils de Harb, chargés de détruire l’idole el Lat. Le peuple de Taïef, persuadé que la déesse allait foudroyer les deux sacriléges, s’assembla pour être témoin de la vengeance céleste[3]. Abusofian prit un énorme marteau, et en frappa la statue ; mais, soit qu’il eût asséné le coup avec trop de force, soit que la frayeur l’eût saisi, il fut renversé par terre. Les cris de joie et les huées des Takifites célébrèrent sa défaite. El Mogharia, prenant le marteau d’un bras plus sûr, en déchargea plusieurs coups sur l’idole, l’abattit, et la mit en pièces. Les

  1. Le Coran, chap. 9, tom. Ier.
  2. Abul-Feda, p. 127.
  3. Jannab.