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le jeune coreïshite, et découvrir des indices de ce qu’il serait un jour. Les lumières qu’il acquit lui firent naître l’envie de prophétiser. Il fit donc une prédiction qui flattait ses hôtes, qui pouvait nuire aux juifs ses ennemis, et qui, sans lui laisser aucune crainte, lui donnait des espérances pour l’avenir. Il n’est pas difficile de faire le prophète à ce prix. Nous avons cru devoir laisser dans l’oubli les miracles dont plusieurs auteurs enthousiastes accompagnent cette entrevue. Nous avons cru devoir taire le sentiment de quelques modernes, qu’un zèle contraire égare[1]. En effet, le mot Bahira signifiant en arabe marin, ils font venir le moine Bahira de Rome. Ils le baptisent du nom de Sergius. Ils le donnent pour précepteur à Mahomet. Ils l’établissent héros de l’islamisme, et lui font dicter le Coran à l’apôtre des mahométans, apparemment sans savoir l’arabe. Libre de préjugés, nous avons suivi la narration simple et fidèle du savant Abul-Feda, qui s’accorde avec celle des historiens contemporains, et nous ne combattrons point le sentiment de ces écrivains préoccupés qui, sans respecter la vraisemblance et le silence de l’histoire, bâtissent sur un mot de nombreuses chimères.

Abutaleb avait ramené son neveu à la Mecque. Héritier de la préfecture du temple, il y jouissait d’un grand crédit. Sa maison était ouverte à tous les princes arabes. Il y recevait tout ce que la nation avait de plus distingué[2]. Mahomet se faisait aimer d’eux par les charmes de son caractère. Parvenu à l’adolescence, on admirait sa beauté ; on aimait les grâces de son esprit. Ingénieux dans ses réponses, vrai dans ses récits, sincère dans le commerce de la vie, plein de bonne foi, plein d’horreur pour le vice, il mérita aux yeux de ses concitoyens le surnom d’Elamin, l’homme

  1. Vicentius Bellovacensis, Petrus Paschasius, Martyr. Historia Mahumetica, cap. 8.
  2. Abul-Feda, page 11.