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ébranlée. Ils se réunirent pour écraser celui qui en sapait les fondemens. Leurs chefs vinrent une seconde fois trouver Abutaleb, et lui tinrent ce discours : « Si tu n’imposes silence au fils de ton frère ; si tu ne réprimes son zèle audacieux, nous allons prendre les armes pour la défense de notre religion. Les liens du sang ne nous retiendront plus ; nous verrons de quel côté se déclarera la victoire. » Abutaleb, effrayé de ces menaces, se hâta d’en faire part à Mahomet[1]. Il en reçut cette fière réponse : « Ô mon oncle ! quand les Coreïshites armeraient contre moi le soleil et la lune ; quand je verrais ces deux astres, l’un à ma droite l’autre à ma gauche, je n’en serais pas moins inébranlable dans ma résolution. » Abutaleb, convaincu que les promesses et les menaces n’avaient aucun empire sur une âme aussi ferme, ne put s’empêcher de lui dire : « Que dois-je répondre aux Coreïshites ? Pour moi, quoique je désapprouve votre conduite, je sens bien que je ne vous abandonnerai jamais, quelque parti que prennent vos ennemis. »

Cependant la tribu, s’étant assemblée, prononça l’exil contre tous ceux qui avaient embrassé l’islamisme. Le crédit d’Abutaleb couvrit Mahomet pour un temps, et l’empêcha d’être enveloppé dans la proscription générale.

Le hasard fournit à son parti un soutien puissant. Il s’était retiré dans un château situé sur le mont Safa. Abugehel[2], l’y ayant rencontré, l’accabla d’injures. Ma-

  1. Abul-Feda, page 21.
  2. Son nom propre était Amrou, fils de Hesham, son surnom Abu el Hocm (le père de la sagesse). La haine éternelle qu’il voua à Mahomet, le fit appeler Abugehel (le père de la folie). Les mahométans ne prononcent jamais son nom sans ajouter Laano Allah (Dieu le maudisse). Abul-Feda, généalogie des Coreïshites. Maracci le confond maladroitement avec Gehel, oncle de Mahomet. C’étaient deux hommes bien différens.