Page:Le Correspondant, 84è année, Tome 247, 1912.djvu/404

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Sans vouloir en rien diminuer le rôle important de la télégraphie sans fil, on est obligé de reconnaître l’importance énorme des signaux sous-marins par temps de brume. Les navires renseignés commençaient par rallier le bateau-feu, puis de là ils pouvaient trouver le Republic. Mais si, en plus, le bâtiment en détresse avait eu un signal sous-marin, que de minutes précieuses aurait-on pu gagner !

Il convenait de le signaler, bien que le cas du Titanic ait été très différent. Au cours d’un danger dont dépend la vie de plusieurs milliers de personnes, il ne faut négliger aucun moyen de sécurité. C’est en accumulant toutes les chances de secours qu’on arrivera à augmenter cette sécurité. Le 23 janvier 1909, les signaux sous-marins ont aidé la télégraphie sans fil à sauver 1600 personnes : cet exemple doit suffire.

La vitesse et l’intensité des sons aériens, par exemple ceux de la sirène, sont influencés par l’état de l’atmosphère, vent, nuages, bancs de brume, tout ce qui, en un mot, constitue une variation de densité. L’eau, au contraire, toujours égale à elle-même, toujours de même densité, est un parfait conducteur du son. Jusqu’à 9 kilomètres, la perception du son est parfaitement nette. Déjà ces signaux sont employés à bord des sous-marins. Le son est émis par une grosse cloche de 60 à 80 kilogrammes dont le battant est mû électriquement. Le récepteur est une sorte de cloche retournée, appliquée avec force à l’intérieur, contre le flanc même du navire. Plein d’un liquide spécial, très « vibrant », il transmet les sons par deux fils microphoniques qui vont à deux écouteurs dans la chambre du commandant. On peut même, paraît-il, avec de l’habitude, arriver à fixer la direction d’où vient le son.

Dieu veuille que la catastrophe du Titanic serve au moins à montrer à l’homme que l’effort de son génie doit s’appliquer désormais à perfectionner les moyens de sécurité. Qu’il s’arrête un instant dans sa course vertigineuse d’inventions de plus en plus démesurées ! Qu’il se retourne en arrière et qu’il regarde cette route par trop jonchée de cadavres ! S’il comprend où est désormais sa voie, le sacrifice de ceux qui sont morts là-bas et que nous saluons profondément n’aura pas été perdu.


Edgar de geoffroy,
Ingénieur naval.