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LES PRINCIPES DE DARWIN

caractères acquis ; il avait au contraire tenté, assez malheureusement d’ailleurs, d’expliquer cette hérédité[1].

Reprenons une dernière fois l’exemple de la girafe. Si les néo-Darwiniens admettent que parmi les petits d’une même portée, ou au moins d’une même génération, il s’est trouvé par hasard quelques monstres doués d’un cou énorme, la sélection naturelle suffira certainement à expliquer la conservation de ce type plus apte dans un pays où il n’y a d’autre nourriture que les feuilles des arbres. Il faut vraiment une foi robuste pour admettre que toutes les variations utiles à une espèce se sont toujours produites une première fois par hasard.

Mais supposons avec Nœgeli, ce qui d’ailleurs est très vraisemblable, qu’il y a eu seulement des petits qui avaient, par hasard, le cou un peu plus long que les autres. Ce caractère congénital se transmettra aux petits de la génération suivante parmi lesquels quelques-uns auront le cou encore plus long et ainsi de suite… Admettons par exemple qu’il ait fallu mille générations pour qu’apparût enfin une girafe avec le cou énorme que nous lui connaissons, chaque génération n’aura gagné qu’un millième de l’allongement du cou. Et vous croyez, dit Nœgeli, que cela aura suffi à donner à ceux qui étaient doués de cet allongement d’un millième une supériorité quelconque sur leurs frères à cou ordinaire ? Or, pour que ceux-là seuls se soient reproduits il faut admettre que ceux-là seuls ont été conservés par la sélection naturelle et cela n’est vraiment pas admissible dans les conditions où nous nous sommes placés.

  1. Théorie des Gemmules, voir plus bas, chap. VI.