à trouver parmi ses avocats un critique aussi routinier
que M. La Harpe ! Cela est pourtant, et cela s’explique :
c’est que M. La Harpe, qui s’est présenté dans
tous les tournois de la poésie, avec le privilège assez
commun de ne vaincre dans aucun, n’a pas manqué de
suivre les traces de ceux qu’il terrassait… dans son journal ;
d’aller sur les brisées de MM. Doigny, Duruffé, Murville,
et autres sopranos de la littérature. Il y a marché
de si près, que ses épîtres ne valent pas mieux que les
leurs. Ses héroïdes sont mauvaises, plus mauvaises que
ses tragédies : ce qui est incroyable, sans être merveilleux.
Elles sont, en un mot, exécrables. Mais les réflexions
dont il les fait précéder ne manquent pas toutes
de justesse : c’est une justice à lui rendre.
« Ovide fut l’inventeur de ce genre de poésie. On trouve dans ses héroïdes beaucoup d’intérêt, un style en général plus naturel que celui de ses autres ouvrages ; mais des redites, des longueurs, quelquefois trop d’esprit, le défaut ordinaire de cet auteur. Ajoutez à cela la monotonie continuelle des sujets ; ce sont presque toujours des amantes malheureuses et abandonnées : c’est Phyllis à Démophoon, Didon à Énée, Hypsipile à Jason, Sapho à Phaon, etc. On sent le dégoût que peut inspirer cette suite de plaintes, de reproches, de regrets, qu’on revoit sans cesse. Il est difficile de lire plusieurs de ces pièces avec un plaisir continu, et je doute qu’un livre d’héroïdes françaises, dans ce goût, pût réussir, fût-il écrit comme Zaïre et Bérénice. »