Aller au contenu

Page:Le Franc - Grand-Louis l’innocent, 1925.djvu/40

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
30
GRAND-LOUIS L’INNOCENT

le regard qui se tendait de l’autre bord vers lui.

Les choses étaient des êtres animés, certaines d’entre elles douées d’un pouvoir maléfique. Une fois qu’à moitié endormi près de la cheminée, il avait légèrement brûlé ses sabots, il s’était mis à démolir le feu à coups de pied, l’apostrophant avec violence.

Les soirs où le vent cherchait à s’introduire comme un coin, sous la porte, il faisait le geste de fendre du bois à coups de hache, afin qu’Ève comprît à son tour le dessein de ce mauvais bûcheron, et il lançait vers le dehors un regard noir. Les vagues écumantes étaient, on ne savait pourquoi, « les Dames », et le halo de la lune « la Sainte Vierge. »

La mémoire lui faisait défaut. Elle essaya de l’employer à quelques commissions dans le village, lui confia des lettres qu’il fallait mettre à la boîte avant le passage du facteur. Des heures après, on l’apercevait sur la pointe, qui guettait les oiseaux de mer atterrissant dans les îles, et elle était sûre que ses lettres étaient encore dans la poche de sa vareuse. Il n’aurait su dire pourquoi ni comment elles s’y trouvaient.

Alors, découragée, elle renonçait à rien tirer de lui. Il n’existait, pour l’homme de