Aller au contenu

Page:Le Franc - Visages de Montréal, 1934.djvu/106

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
106
marie le franc

que celui-ci vient, un petit vieux, un numéro extraordinaire aussi, comme les trois quarts des gens qui composent son entourage. Elle ne sait pas encore toute son histoire : il possède une maison de vingt-cinq mille dollars, tient une boarding-house, et fait des ménages par plaisir. Elle ne pourra le garder, car cela donne de l’indigestion à Nanki, de voir des visages nouveaux. C’est dommage : un vieux à beaux gestes ! Il a remarqué les souliers à pointe de Jeannine, un matin, quand elle dirigeait les opérations méthodiques du ménage. Des souliers si démodés pour une si belle dame. Le lendemain, il lui apporte une paire de chaussures un peu déjetées, mais encore très vernies et smart qu’une de ses pensionnaires a mises au panier. Jeannine hésite entre la répugnance et le sentiment. Le sentiment l’emporte : il ne faut méconnaître aucune délicatesse. Elle tâte du bout de son pied, fleurant la lavande, l’intérieur inconnu de ces souliers, heureusement trop petits !


Bobette se faisait admirer à cheval sur Hill-Park chaque dimanche matin. C’est le jour où les vrais cavaliers se tiennent chez eux et où les autres épatent le public sur leurs chevaux de louage à trois dollars l’heure. On voit des costumes trop neufs, des bottes trop fauves, des cravaches trop vernies, des genoux remontés, des bras secoués, des