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Page:Le Franc - Visages de Montréal, 1934.djvu/208

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marie le franc

quand on y appartient de chercher à s’en échapper.

De sa voix qui se maintenait dans le registre supra-terrestre, elle m’expliquait que son mari assistait à un dîner d’affaires et que son petit garçon était chez des amis à la campagne, au Lac Écho, dans les Laurentides, où elle-même venait de passer un mois. Elle était arrivée à Montréal la veille.

J’hésitais à en venir à la question de son état. Il fallait apporter dans l’examen que je faisais d’Annabel la prudence avec laquelle on approche un blessé inconnu.

Un maître d’hôtel frappa à la porte, apportant le repas qu’elle avait commandé. Il fit rouler devant elle une table servie et se retira. Annabel demeura sans bouger, puis, à ma prière, parut se réveiller, remplit d’eau son verre et y versa une petite cuillerée de poudre blanche. Elle se décida à plonger sa cuiller dans le bol d’argent du potage, fit la grimace, ajouta du sel, y goûta de nouveau, et le repoussa. Ensuite elle attira à elle un plat qui contenait je ne sais quelle volaille diminutive sur un sombre lit de champignons, s’exclama en français : « Mon Dieu ! Qu’est-ce-que-c’est-que-ça ? et laissa retomber le dôme brillant du couvercle.

Elle se rabattit sur la meringue glacée du des-