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dans ses Mémoires : « Tout me lasse ; je remorque avec peine mon ennui avec mes jours, et je vais partout bâillant ma vie. » La vue supérieure, sinon intime et profonde, qu’il prenait des choses lui en faisait sentir rapidement la vanité : « Hors en religion, écrivait-il en 1840, je n’ai plus aucune croyance… » « Je ne crois à rien, répétait-il plus tard, excepté en religion. »

Mais cette religion même, on a prétendu qu’elle n’était chez lui qu’une attitude. On sait les accusations de Sainte-Beuve à cet égard. Des anecdotes suspectes y ont ajouté. N’a-t-on pas dit que le célèbre critique avait eu en sa possession un exemplaire du Génie du christianisme annoté par l’auteur où celui-ci démentait en marge ses propres affirmations et se révélait cyniquement athée ? Auguste Comte aurait voulu voir cet exemplaire et serait allé le consulter chez Sainte-Beuve. Il est seulement dommage, pour l’authenticité de l’anecdote, qu’à la mort du critique des Lundis, quand sa bibliothèque fut mise aux enchères, l’exemplaire ne se soit plus retrouvé. Chateaubriand n’avait certainement rien, en religion, d’un zélateur ni d’un sectaire. « Je veux la religion comme vous, écrivait-il à M. de Montlausier ; mais je hais comme vous la congrégation et ces associations d’hypocrites qui transforment les domestiques en espions et qui ne cherchent à l’autel que le pouvoir. » C’était, en d’autres termes, ce qu’on nomma plus tard un catholique libéral. Ses « accès de respect humain » ne furent même ni si fréquents ni si prononcés qu’on l’a dit. Loin qu’il ait fait « comme ces femmes du monde