Page:Le Goffic - L'Âme bretonne série 1, 1902.djvu/13

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Il n’est pas vrai que les idées n’ont pas de patrie. Tu nous appartiens par ton cerveau comme par les fibres les plus délicates de ta sensibilité. Pour une fois ne serre pas de trop près les mots : accorde-leur de signifier ce qu’ils signifient pour le commun des hommes. Ils veulent dire ici ; ô rationaliste impénitent, que tu es resté, comme les plus humbles de ta race, un incurable idéaliste. Dans sa belle conférence sur le Génie breton, M. Brunetière définissait l’idéaliste « un homme pour qui la seule ou la principale raison de vivre est de chercher le sens de la vie. » Formule heureuse et qui permet de tout concilier. Mais, quand elle m’aurait fait défaut pour t’annexer à nous, je me serais souvenu de ce passage d’un de tes livres où tu n’as pas plutôt signifié à la métaphysique d’avoir à déguerpir du dictionnaire qu’on t’y voit installer en ses lieu et place une métanthropie dont aucun rationaliste n’eût osé s’aviser jusqu’à toi. Quelque chose existerait donc en dehors, au delà de l’homme ? — Oui, dis-tu, mais ce quelque chose est sans action sur l’homme et ne peut être connu de lui. N’est-ce point déjà commencer à le connaître, cependant, que de savoir qu’il existe ? Mais il nous suffirait qu’en affirmant son existence tu aies ouvert le champ à la spéculation et au rêve. Va, tu es toujours de cette race qui « a au cœur une