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LE PATRIARCHE DU ROMAN FEUILLETON

(PIERRE ZACCONE)




Brest, la patrie de son cerveau et de son cœur — enfant de troupe, il était né à Douai par accident ou surprise, au cours d’un changement de garnison — Brest ne donnera-t-il point à quelque rue le nom de Pierre Zaccone ? L’hommage n’aurait rien d’excessif. En mes primes années, j’ai beaucoup fréquenté Pierre Zaccone. C’était un homme très grand, très fort et très doux, ce qu’on appelle un bon géant. Avec l’âge, le géant avait tourné au patriarche : ses tempes s’étaient auréolées d’une belle couronne de cheveux blancs ; ses traits, d’un galbe plus sémitique que latin, s’étaient légèrement empâtés ; un imperceptible brouillard s’était répandu sur ses prunelles, qu’il avait bleues comme un ciel de mai…

L’accueillant vieillard ! Je le rencontrai pour la première fois, il y a une vingtaine d’années, à Locquirec, un de ces « petits trous pas chers » de la rude Manche finistérienne que le tourisme et les billets circulaires devaient si odieusement banaliser : mon frère Alphonse et moi, humbles, débutants de lettres,