Page:Le Goffic - L'Âme bretonne série 1, 1902.djvu/324

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les Anglo-Saxons et les Slaves et qui commence à travailler les Celtes de Grande-Bretagne, n’est qu’un élargissement de la notion de patrie. Aveugle qui ne le voit pas. Aveugle aussi qui ne voit pas combien cette notion (à défaut de l’idée de race qui nous est étrangère et dont nous ne parvenons pas, pour notre pays, à préciser exactement les termes) s’est affaiblie et comme délitée en nous depuis quelques années. Si la désagrégation continue, quelle raison aurons-nous encore de persévérer dans l’être, comme s’expriment les métaphysiciens, et non pas quelle raison seulement, mais quel droit ? « Une nation est une conscience morale, disait Renan. Tant que cette conscience prouve sa force par les sacrifices qu’exige l’abdication de l’individu au profit de la communauté, elle est légitime, elle a le droit d’exister. » Soyons sincères avec nous-mêmes : la conscience française n’aura bientôt plus aucune exigence. Ce peuple, qui fut tout action, a comme la nausée de effort. Une maladie étrange le ronge, l’aboulie, la paralysie de la volonté. Il faut parler bas à son chevet et Renan, cette fois, n’a pas assez ouaté sa phrase ; je n’ai pas assez senti moi-même, peut-être, ce qu’il y avait d’inconvenant et presque de cruel à remuer devant ce moribond les ombres pathétiques de ses derniers héros.