Page:Le Goffic - L'Âme bretonne série 2, 1908.djvu/130

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Paimpol, Plouaret, etc), mais la plupart de nos petits bourgs bretons ont continué de vivre dans l’intimité des morts. Le cimetière qui fait couronne à l’église, cœur du village, y est comme une cité au milieu de la cité. Et c’est la cité définitive au milieu de la cité transitoire. Fief indivis de la race et son patrimoine le plus certain, vers elle convergent toutes les pensées et l’effort artistique des générations, rivalisant pour lui donner la splendeur qui convient aux manifestations de l’âme collective.

À Sizun, à Berven, à Lampaul, à Telgruc, à Plogonnec, à La Martyre, à Sainte-Marie-du-Ménéhom, etc., on pénètre dans le cimetière par de véritables arcs de triomphe ; à Saint-Thégonec, d’énormes piliers avec niches, pilastres, boules godronnées, surmontés de doubles lanternons et de croix, font un portique incomparable, digne des plus fastueux campi-santi, au champ de repos d’un village de 400 âmes. Et, dans ce champ même et dans ceux de Guimiliau, Quilinen, Saint-Jean-du Doigt, Runan, Gurunhuel, Pleubian, Loguivy, etc., que de merveilles accumulées ! Quelle entente de la décoration funèbre et des motifs les plus propres à composer une belle synthèse architecturale ! Peu ou point de ces mausolées prétentieux qui consacrent une mémoire individuelle et passagère ; mais d’humbles dalles, de petits tumulus anonymes cerclés de coquillages et de galets. Effacement volontaire, et qu’on voudrait voir imposé partout, pour ne pas contrarier l’élan, nuire à l’effet de la merveilleuse flore de granit épanouie sur le prosternement des tombes : fontaines miraculeuses aux vasques superposées,