Page:Le Goffic - L'Âme bretonne série 2, 1908.djvu/152

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tait, l’autre soir, une sardinière de Douarnenez. Il faudrait vous entendre, maîtres chansonniers de Bretagne, Théodore Botrel, Yann Nibor, Heurtel, Jean Franc, Cherouvrier, et toi, grandiloque pentyern de la bonne duchesse, Léon Durocher, prince de l’humour bretonne, Rabelais armoricain… Ô poètes, ô chansonniers, ô pentyern, vous êtes les meilleurs ouvriers de la décentralisation ! Cette province française si diverse, si prenante, cette jolie âme bigarrée qui fleurissait dans les mœurs et les parlers dialectaux, que fût-il resté d’elle, si vous n’aviez enclos aux pages de vos livres un peu de son parfum ? Payons-la de réciprocité ; penchons-nous sur elle, tandis qu’il en est temps encore. Et ne méprisons point trop ce rôle d’embaumeurs qui est l’éternelle condition des poètes. Quand Virgile s’en allait demandant aux bouviers et aux chevrières les reliques dispersées de la vieille âme latine, pour la coucher, suivant l’involontaire alexandrin de Renan.

Dans le linceul de pourpre où dorment les dieux morts,


il ne faisait qu’obéir à la même loi mystérieuse qui nous incline aujourd’hui sur le passé de notre chère Bretagne.

Et enfin ce passé… il est peut-être l’avenir, s’il n’est plus le présent. La puissance de redressement des races celtiques est infinie. Qui le sait mieux que M. Roger-Ballu, M. Le Fur, M. Hugues Lapairo, qui ont inscrit sur leur drapeau ces mots magiques : Renaissance provinciale ? Votre œuvre est belle et courageuse,