Page:Le Goffic - L'Âme bretonne série 2, 1908.djvu/307

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quatre fers en l’air… Non, continue lady Herbert, je n’ai pas eu la chance de voir de pwckas, mais j’ai vu souvent, au matin, dans les prairies, le gazon tout foulé et comme piétiné en rond par des milliers de petits sabots.

— J’ai vu aussi de ces ronds, répliquai-je. Certains savants les attribuent à une poussée de champignons minuscules qui dessèchent subitement le gazon. Pendant un de mes séjours à Bréhat, avec le regretté Luzel, on vint nous chercher un matin pour nous montrer un de ces ronds de korrigans ou follikeds qui sont les pwckas de la Bretagne ; l’herbe était toute blanche à la périphérie, comme si un objet pesant de forme circulaire, une grande roue de charrette, par exemple, y avait été posée à plat pendant plusieurs jours. Mais le propriétaire de la prairie nous affirma qu’il n’en était rien, que la veille au soir l’herbe était nette et lisse et qu’il fallait chercher une autre explication. Je me penchai sur le rond pour essayer d’y découvrir les champignons minuscules dont on m’avait parlé ; mais sans doute qu’ils n’étaient visibles qu’au microscope, car je n’aperçus rien.

— Le microscope ne vous eût rien fait découvrir de plus, me répondit mon interlocutrice, et vous raisonnez comme un mécréant. J’aime mieux croire aux lutins qu’à vos cryptogames. Les lutins, au moins, on les a vus. Pas moi ni vous. Mais avons-nous vu César, Cromwell et Napoléon, et cela nous empêche-t-il de croire à leur existence, certifiée par tant de témoins ? Tous les lutins portent des fog-caps, des chapeaux de brouillard qui les rendent invisibles. Un des tenanciers de