Page:Le Goffic - L'Âme bretonne série 4, 1924.djvu/103

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

tains jours comme une ombre, n’y a-t-il pas comme un vague regret du passé ? À Ambroise, à Blois, elle s’entoure d’une garde de cent gentilhommes bretons, « qui jamais ne falloient, quand elle sortoit de sa chambre, fùst pour aller à la messe ou s’aller promener, de l’attendre sur cette petite terrasse de Blois qu’on appelle encore « la Perche aux Bretons », elle-mesme l’ayant ainsy nommée ». Du plus loin qu’elle les apercevait : « Voylà mes Bretons, disait-elle, qui m’attendent sur la Perche ». Et, sur cette même Perche aux Bretons, en ses heures de mélancolie, ne se donnait-elle point le déchirant régal des musiques de là-bas, que lui sonnaient quatre joueurs de binious et de bombardes appelés tout exprès à Blois pour la bercer des airs de son pays ?

Quel dommage, mon cher Directeur, que l’impiété de Gaston d’Orléans n’ait pas respecté ce menéc’hy royal, cette sorte de lieu d’asile des songeries bretonnes de la reine Anne ! Nous y eussions pèlerine de compagnie. Mais la Perche aux Bretons n’existe plus dans son état primitif. François Ier qui avait commencé la transformation du château de Blois, avait du moins conservé, sur la face Ouest, les bâtiments qui bordaient cette petite terrasse. Gaston d’Orléans vint qui les remplaça par une aile de sa façon, prétentieuse et lourde. Il faut chercher ailleurs notre bonne duchesse. Sera-ce dans ces galeries où son chiffre et ses hermines s’entrelacent avec le porc-épic, qui était le peu galant emblème de Louis XII ? Voici la chambre où elle expira le lundi 9 janvier 1514, à 10 heures du matin. Montons encore cependant. Et c’est que, plus que partout ailleurs peut-être, Anne de Bretagne est présente sur ces hautes terrasses du château d’où l’on découvre la ville basse, le quartier Saint-Nicolas et le cours sinueux