JOSEPH BÉDIER DU MÉNÉZOUARN
Sans doute nous ne sommes plus au temps où, pour
excuser l’Académie française, qui avait appelé
à elle l’abbé Gallois, Fontenelle devait expliquer au
public qu’aucun des statuts de l’illustre Compagnie
ne lui interdit de recevoir « l’érudition qui n’est pas barbare »
sur le même pied que l’éloquence et la
poésie. Les plus grands de nos érudits, un Fauriel,
un Littré, un Gaston Paris, un Bréal furent des lettrés
de la plus haute distinction. Et c’est aujourd’hui
le cas d’un Joseph Bédier. Il y avait tout de même
jusqu’ici, à chaque élection de ce genre, un petit
mouvement de surprise dans le public : le moindre
vaudevilliste lui est assurément plus sympathique et
est, en tout état de cause, beaucoup mieux connu de
lui que les plus fameux de nos érudits. Mais pour
Joseph Bédier, rien de pareil, et les cent et quelques
éditions de son Tristan en faisaient presque l’égal
de l’auteur de Phi-Phi.
Cependant, et puisque on veut que cette réception de M. Bédier soit un signe de renouveau celtique, comment ne pas s’étonner un peu que, dans son très beau discours de réception, le nouvel académicien, qui a si bien parlé de son pays d’origine, « noble entre les nobles terres de douce France », la « petite île Bourbon », n’ait pas trouvé un mot de