Page:Le Goffic - L'Âme bretonne série 4, 1924.djvu/322

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née, sa femme Gwen-Arc’hant (blanche comme l’argent), qui était de Basse-Bretagne comme lui, mit au monde un fils qu’on appela Tristan. Et ce fut Tristan le bien nommé ; car, à la mort de ses parents, chassé par ses vassaux en révolte, il lui fallut chercher un asile à Fougères près du Seigneur Main, lequel avait pour sœur Inoguen.

« Or, cette sœur, belle à merveille, dit la chronique, aima Tristan de Vitré et, désirant l’avoir à époux et non autre, révéla le secret de son cœur à son frère Main, qui de ce requit Tristan. Et Tristan, en s’excusant, répondit qu’il était déshérité et n’avait terre où il la pût mener quand il l’aurait épousée. Adonc Main lui promit en dot de mariage, avec la dite Inoguen sa sœur, tout ce qu’il avait en Vandelais, outre le fleuve de Couesnon. Quand Tristan se vit ainsi pressé, il considéra la grâce que lui avait faite Main ; ainsi ne l’osa refuser, mêmement pour l’honneur et la beauté de la demoiselle, et la prit à femme avec la dot qui lui fut assise et baillée. »

Conte-t-on encore ce joli déduit d’amour aux pèlerins qui se rendent de Vitré à Fougères ? L’histoire de Tristan et d’Inoguen a comme un parfum de chevalerie. Les Guides devraient la recueillir : ce serait la meilleure initiation aux beautés féodales de la reine des places fortes bretonnes.

Fougères en effet offre cette singularité d’être à la fois une ville industrielle — la première ville industrielle de Bretagne après Nantes — et une ville du plus parfait archaïsme, la ville par excellence de la féerie celtique : Viviane de Brocéliande n’y est-elle point honorée sous le vocable d’une sainte totale-