Page:Le Goffic - L'Âme bretonne série 4, 1924.djvu/79

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tion les éléments d’une frugale réfection nocturne, kik-saezon, crêpes et laitage : les hôtes du logis se partagent au matin les reliefs de ce « past » mortuaire, et c’est leur façon de communier avec l’esprit des ancêtres.

Bien évidemment, la coutume du bara an anaon est née de cette croyance en un prolongement matériel et souterrain de la vie des âmes, — croyance qui, par parenthèse, dut être générale dans l’ancienne Gaule et le fait est qu’on en trouve des traces chez les Belges. Nous savons, par exemple, qu’à Bruges, il y a peu de temps encore, on pétrissait dans chaque ménage, la veille du jour des Morts, des galettes spéciales nommées pankœken, qu’on faisait bénir à l’église, puis qu’on répartissait entre tous les membres de la communauté. Chaque galette dévotement croquée rachetait une âme. Aujourd’hui, le pankœken ne se mange plus en famille. Mais, par une déviation singulière de l’usage, on en fabrique encore dans certains restaurants et cabarets populaires, où les meurt-de-faim de la localité, ravis de l’aubaine, se tiennent en permanence pendant toute la journée du 1er novembre et, moyennant une petite rémunération et quelques chopes supplémentaires, se chargent d’engloutir autant de galettes funèbres qu’on veut bien leur en offrir. Le peuple croit, en effet, que le pankœken peut être mangé par n’importe qui et que, pourvu qu’on le mange à l’intention d’un défunt bien déterminé, l’acte conserve toute son efficacité.

Le bara an anaon des Plougastélois présente de grandes analogies avec le pankœken. Mais, tandis qu’en Belgique la coutume populaire, si touchante, qui fait participer les défunts, pendant un jour de l’année, à la nourriture des vivants, s’est gâtée insen-