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Page:Le Goffic - Le Crucifié de Keraliès.djvu/145

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recouvert la chaussée, il s’y jeta tout vêtu, prit pied en quatre brasses, escalada le plateau et, d’une poussée d’épaules, se rua par la porte crevée dans la demeure des Salaün…

À genoux contre terre, mains jointes devant son grand crucifix de cuivre qu’elle avait placé sur la table entre deux bouts de suif, Coupaïa récitait les psaumes de la pénitence ; Salaün dans un coin, hébété d’eau-de-vie, faisait les répons machinalement. Thomassin ne vit que la femme ; il ne lui laissa pas le temps de se remettre debout ; il saisit le premier instrument qui lui tomba sous la main, le crucifix, et le levant à pleins poings sur la tête de Coupaïa :

— Tiens, pour toi, N… de D… de canaille !

— Le crucifix ! Le crucifix ! hurla la femme.

Ses yeux ardaient dans sa face, moins de terreur encore que d’abomination contre un tel sacrilège.

De toutes ses « saintetés », c’était ce crucifix la plus chère. Non qu’elle fût sensible à sa beauté, ni à sa forme étrange. Mais ce crucifix avait une histoire singulière, que Coupaïa tenait de sa tante, qui la tenait elle-même de ses grands-parents, à qui elle avait été contée par