Page:Le Goffic - Poésies complètes, 1922.djvu/14

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pathie d’un tel maître lui servira de caution près des uns et d’excuse près des autres.

Par ailleurs, il sait très bien tout ce qu’a de trouble, d’indéfini et quelquefois de contradictoire la sensibilité qui s’exprime ici. S’il a pu çà et là, comme l’en louait M. Charles Maurras, donner « à l’incertitude des choses une voix précise, une voix classique et latine », c’est peut-être que, du côté maternel, une lointaine ascendance italienne travaillait à discipliner en lui les élans du Celte : elle n’a pas supprimé le Celte et il n’y paraît que trop. Qu’y faire ? Il faut savoir se résigner à être de sa race.

L’auteur ose donc se réclamer de la sienne près du lecteur. « La pure, l’inimitable note celtique », pour parler comme Matthew Arnold, ne s’est pas tue avec Taliésin et Lywarc’hen. Elle sonne encore chez nos bardes. Mais elle est inséparable de la langue et peut-être de l’atmosphère bretonnes : sous un autre ciel, dans un autre idiome, sa monotonie devient vite fatigante. Il en est de cette note presque continûment élégiaque comme du motet en l’honneur de saint Patrice dont les moines irlandais ne pouvaient se rassasier et qui avait « sons si clers et si doux » que le saint lui-même descendait du paradis pour mieux l’ouïr. Or, un jour que le chœur des moines reprenait pour la troisième fois la prestigieuse rengaine, un profane demanda en