Page:Le Goffic - Poésies complètes, 1922.djvu/176

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Myrdhynn, ma force s’en va toute :
N’accable pas un cœur déjà tant éprouvé !
Hélas ! Je pèse moins dans tes mains redoutables
Qu’au vent des nuits d’hiver la paille des étables
Ou l’humble grain de sénevé.
Je t’appartiens. Je suis la cendre au creux de l’urne ;
Je suis l’agneau, toi le lion.
Ô Ténébreux, ô Taciturne,
Tu m’as prise sans bruit comme un voleur nocturne,
Tandis que je dormais dans les bras de Gwion.
Nos destins sont pareils ; pareils furent nos crimes :
Perdus au fond de notre amour,
Ni lui, ni moi nous n’entendîmes
L’appel magique de tes rimes,
Tintant sur la forêt dans le déclin du jour
Fatal oubli dont nous portons la peine !
Bondissant du sombre ravin.
Tu parais et, foulant notre lit de verveine,
Tu m’arraches des bras qui me pressaient en vain,
Pour me jeter, pleurante et nue et qui frissonne,
Sur une route morne où ne passait personne.
« Va-t’en devant toi, va, me dis-tu. Marche ainsi
Mille ans ! Cherche partout, dans le vent et la brume,
Dans le labeur et le souci,
Celui dont le regret vainement te consume
Et que j’exile aussi.