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16 LE KORAN.  
    de Salomon[1] ; mais ce n’est pas Salomon qui fut infidèle, ce sont les démons. Ils enseignent aux hommes la magie et la science qui était descendue d’en haut sur les deux anges de Babel, Harout et Marout[2]. Ceux-ci n’instruisaient personne dans leur art sans dire : Nous sommes la tentation, prends garde de devenir infidèle. Les hommes apprenaient d’eux les moyens de semer la désunion entre l’homme et sa femme : mais les anges ne faisaient du mal à qui que ce soit sans la permission de Dieu ; cependant les hommes apprenaient ce qui leur était nuisible, et non pas ce qui pouvait leur être utile, et ils savaient que celui qui avait acheté cet art était déshérité de toute part dans la vie future. Vil prix que celui pour lequel ils se sont livrés eux-mêmes. Ah ! s’ils l’eussent su !
  1. Ah ! s’ils avaient cru et s’ils avaient craint Dieu ! la récompense de la part de Dieu eût mieux valu. Ah ! s’ils l’eussent su !
  2. Ô vous qui croyez ! ne vous servez pas du mot raïna (observez-nous), dites ondhorna (regardez-nous[3]). Obéissez à cet ordre. Un châtiment douloureux attend les infidèles.
  3. Ceux qui possèdent les Écritures, ainsi que les idolâtres, ne veulent pas qu’une faveur quelconque descende sur vous de la part

  1. Les démons, disent les commentateurs, avaient enfoui sous le trône de Salomon des livres de magie, et répandirent après sa mort le bruit qu’on n’avait qu’à chercher sous le trône les livres contenant la science par laquelle Salomon s’était soumis les hommes, les génies et les vents. Voyez sur Salomon, chap. XXVII, XXXIV et XXXVIII.
  2. L’histoire de ces deux anges paraît être empruntée aux traditions talmudiques. Voici ce qu’en disent les commentateurs : Les anges déploraient en présence de Dieu la méchanceté des hommes, malgré l’envoi réitéré des prophètes. Dieu leur ordonna de choisir deux d’entre eux pour juger les hommes. Harout et Marout furent ces deux juges, et ils s’acquittèrent scrupuleusement de leur charge, jusqu’au moment où une femme d’une rare beauté (on l’appelle Zohra, mot que l’on traduit communément par Vénus) leur apparut, invoquant leur autorité contre son mari. Les deux anges, épris de ses charmes, voulurent la séduire ; mais elle disparut en un clin d’œil, et les anges, revenant au ciel, se virent l’entrée défendue. Grâce à l’intervention d’un bienheureux, Dieu leur donna le choix entre les peines de ce monde et celles de l’enfer, qu’ils savaient être éternelles. Ils choisirent donc les tourments de ce monde ; c’est ainsi qu’ils restent à Babylone, suspendus entre le ciel et la terre. Tel est le résumé le plus accrédité des commentateurs sur ce passage, bien qu’il serve peu à l’expliquer. D’autres docteurs pensent que Harout et Marout n’étaient que des magiciens enseignant la magie aux hommes. Des commentateurs ajoutent que c’étaient deux hommes qu’on appelait anges à cause de leur extérieur séduisant.
  3. Mahomet veut substituer, dans la salutation, le mot ondhor à celui de raï, que les Juifs employaient à dessein comme ayant les mêmes lettres radicales que le verbe roua, expression de mauvaise augure qui veut dire : être malheureux